HOMA, le quartier des possibles… pour eux. PARTIE 2

Analyse du rôle et discours de la SDC des promenades Hochelaga.

PARTIE 2 – LES COMMERCES

Quant aux entrepreneurs, certains ont flairé la bonne affaire. Les rues Ontario et Sainte-Catherine Est ont récemment été investies par des restaurants trendy […]”

Ce que la SDC veut

Le mythe : La SDC parlent de ceux qui écrivent l’ « histoire de demain, (…) des commerces à saveur culturelle, à tendance écoresponsable, reflet d’une communauté artistique » (ancien site internet). Tout en faisant miroiter ce changement, on nous parle d’authenticité… c’est le tour de magie de la SDC, tout changer en restant authentique.

La SDC appelle de nouvelles entreprises à venir s’installer à Hochelaga. Elle veut « convaincre les nouveaux entrepreneurs à envahir les Promenades » par des « offensives ciblées ». Certainement pas n’importe quelle entreprise, la Société a des demandes très précises. Entre autres : Un Starbucks, un Aldo, un magasin de cupcakes, des restos-brunch, un Juliette et Chocolat, un centre de « hot yoga », un Yves Rocher, un Stokes pour Ontario; des entreprises de Web/design, des bureaux de comptables, des galeries d’art, des antiquaires, des showrooms de bijoux et des restos-chaines (Tim Hortons, Five Guys, etc.) pour Sainte-Catherine.

Évidemment, aucune mention des 3-4 restaurants déjeuners abordables de la rue Ontario qui ont disparu dans les dernières années (Michelle BBQ, Resto Davidson, Roi d’Ontario). Mais on ne veut pas que des entreprises du genre reviennent dans le quartier, on veut des Quoi de n’oeuf, P’tit cochon santé, Ben et Florentine pour reprendre leur place.

On sent dans la description de la rue Sainte-Catherine que la situation est difficile pour les commerces qui intéressent la SDC. « Compte tenu du contexte », il faut faire avec les « audacieux » qui se lancent en affaires dans le coin. On fait moins les difficiles quand le contexte ne le permet pas. On se satisfait de commerces qui vendent en ligne et ailleurs. Pour les pauvres de Sainte-Catherine, pas question d’avoir des commerces de proximité. Face à la situation évidente de désert alimentaire sur la rue Sainte-Catherine, entre Moreau et Pie-IX, la solution de la SDC : antiquaires, showrooms et comptables. Très « solidaires » et un gros 10/10 pour « l’entraide ».

C’est d’ailleurs très bien réussi. La rue Sainte-Catherine est maintenant un immense magasin à ciel ouvert de meubles en teck, galeries d’art contemporaines, magasins de cossins en chanvre bio, d’entreprises faisant affaire sur internet et d’artistes hipsters visant le starsystème. Vive le nouvel Hochelaga à saveur culturelle et écoresponsable.

Seul entre Pie-IX et Viau réside un peu d’espoir, puisqu’on y trouve des divertissements pour consommateurs aisés : Théâtre Denise Pelletier, des « restos en vue (Chez Bouffe, les Affamés, In Vivo) » et des artistes. Mention spéciale aux Affamés, commerce qui a le culot de s’appeler ainsi avec des tables d’hôtes à 37.50$, dans un quartier où la faim n’est pas disparue.

La SDC cherche aussi à ouvrir des nouvelles succursales d’entreprises qui fonctionnent déjà sur d’autres artères gentrifiées (Wellington, Fleury, Masson, etc). Dans cette partie du plan de développement, on oublie bien vite les blablas sur « l’unicité » et la volonté « distinctive ». « L’angle de communication : les Promenades Hochelaga-Maisonneuve, c’est l’emplacement idéal pour l’expansion de vos affaires. » L’idée de faire d’Hochelaga quelque chose de différent des autres quartiers gentrifiés c’est une bullshit pour attirer des nouveaux clients en quête d’originalité qui ne dépayse pas trop.

Pas un mot sur la question de produits abordables, de la disparition de commerces, sur les clientèles cible des nouveaux, les groupes communautaires, les écoles moisies. Juste des commerces trendy et des beaux parcs. Vraiment, face à un phénomène aussi rapide et violent que la gentrification à Hochelaga, il n’y a pas de remise en question de la part de la SDC. Aucune solution n’est proposée, puisqu’il ne semble pas y avoir de problème. On voit bien qu’ils s’en calissent que les pauvres puissent manger, tant que leurs commerces prospèrent.

Ce que la SDC ne veut pas

Dans la section « le Quartier » sur l’ancien site internet de la SDC, on nous résumait les « projets les plus importants », pour avoir une « qualité de vie saine et un environnement commercial des plus attrayants. » Ces projets sont : la Place Valois, les projets immobiliers « s’adressant à une clientèle de jeunes professionnels ayant des revenus élevés », de la reconversion de bâtiments industriels en bureaux.

Ce sont des gens du marketing qui cherchent à attirer une espèce de clientèle, creative class, nouvelle famille, à coup de pubs débiles vantant le Marché Maisonneuve comme un paradis perdu1.

La SDC, dans son auto-promotion, essaie de faire preuve d’auto-critique. Elle relève donc les « points négatifs » des ces deux artères. Sur Ontario, c’est les anciens magasins, « aux vitrines peu engageantes », les dépanneurs et « magasins d’escompte », les magasins de vêtements « peu attractifs » qui la dérangent, bref les endroits où les pauvres magasinent. Sur Sainte-Catherine, c’est la prostitution, perçue comme un phénomène qui « ternit l’image » et non comme un problème social, vécu en premier lieu par les principales intéressées. On pousse l’idée encore plus loin, en affirmant que serait une bonne idée « d’interdire les inscriptions manuscrites et la juxtaposition d’affiches ». On cherche à créer un quartier liché, asceptisé, où tout est construit en fonction de sa présentabilité. On cherche à faire de la rue Ontario un lieu touristique foodie ou quelque chose du genre, un Disneyland de la consommation responsable et hype. Décidément, la gentrification c’est l’avènement d’une société du spectacle de la gauche caviar (ou gauche brouepub c’est selon).

Tout ça, pour augmenter le « sentiment de sécurité » dans le quartier à coup de fric, à coup de flics. C’est selon eux, un des principal facteurs de décision de son choix de quartier. Encore cette idée de garder les résidents (lire ici : ceux qui comptent, ceux qui arrivent avec de l’argent) dans le quartier. C’est le but de toute l’entreprise gentrificatrice de la SDC. Parce que oui, dans ce plan, tous les résidents ne sont pas sur le même pied d’égalité.

La troisième partie s’attarde sur la figure du résident dans le plan de développement. La première partie, sur l’image de marque d’Hochelaga.

Plan de Développement SDC 2014

Introduction

PARTIE 1: IMAGE DE MARQUE

PARTIE 3: FIGURE DU RÉSIDENT (à paraître le 24 février)

 

1Publicité, Hochelaga le quartier aux milles attraits, 3 min. : https://www.youtube.com/watch?v=X0e4j9R74LQ